Le dernier témoin de l'arrestation de Maria
Les années 1989 marquent le début de mes recherches historiques, généalogiques et familiales. Depuis cette date, les archives ont souvent été déplacées d'un service à un autre et/ou déménagées d'un organisme vers un autre.
Si bien que j’ai reçu parfois à des années d’intervalles un dossier déjà en ma possession, sans obtenir d’information supplémentaire, à ma grande déception ! Cela a été le cas avec le dossier de naturalisation de mon grand-père paternel Rafaël obtenu dans un premier temps aux archives de Paris, initialement situées rue des archives, puis transférées temporairement aux archives de Fontainebleau où je m’étais déplacée fin 2011 pour le consulter, c’était le jour de l’enterrement de ma tante Shinka. Le dossier est passé ensuite par les archives parisiennes au 11 rue des Quatre fils dans le 3ème, il se trouve maintenant référencé aux archives de Caen…...
Concernant ma grand-mère Maria, la première épouse de Rafël, les archives de la préfecture de Police de Paris se sont révélées plus fructueuses au cours du temps. Situées jusqu'en 2013 dans l’hôtel de Police du 5ème arrondissement de Paris, où je me déplaçais régulièrement entre 2010 et 2012, elles se se sont ouvertes au public au Pré-Saint-Gervais au 25-27 rue Baudin en janvier 2014, un nouvel espace, que j’ai découvert pour la première fois en avril 2018.
Un nouveau et précieux document pour Maria Silberstein, ma grand-mère inconnue, est venu alors compléter son histoire dramatique.
En cherchant avec pugnacité dans les dossiers d'arrestations de mes proches, j'ai trouvé les éléments des enquêtes de police menées après-guerre sur les « non rentrés ».
Le terme « non rentrés » désignait les personnes qui n'avaient pas survécu à la guerre quelque soit la cause de leur disparition.
Les ayants-droits des morts en déportation avaient la charge de mener des démarches administratives pour prouver que leurs proches avaient été déportés en espérant qu'une forme de justice leur soit rendue par une compensation financière. Les démarches pouvaient durer de longs mois et les réparations minimalistes devenant effectives après plusieurs années seulement.
En consultant ce dossier, de nouveaux documents précisant les conditions de l'arrestation de Maria me sont apparus à la lecture du témoignage de son voisin de palier, Ferdinand Boire, qui assista à l'arrestation.
J'ai appris ainsi qu'elle ne vivait pas seule et que probablement l'appartement où ils furent tous deux arrêtés était celui de son compagnon puisque son adresse initiale est restée la même dans le 11ème sur tous ses documents administratifs.
Maria Silberstein a été arrêtée à son domicile 54 rue du Vert Bois Paris 3ème comme israélite le premier jour de la rafle du Vel d’Hiv 16 juillet 1942 et déportée de Drancy vers Auschwitz le 29 du même mois.
L'enquête effectuée à la demande de l'Office Départemental des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre en 1951, reprend le témoignage de Ferdinand Boire, né le 30 avril 1899 à Paris, artisan mécanicien-éléctricien qui déclarait :
« Un matin du mois de juillet 1942, un gardien de la paix, accompagné de deux civils (dont un allemand), ont procédé à l'arrestation à son domicile, de Mme Silberstein Maria, qui habitait le logement à côté avec un de ses compatriotes.
Le gardien de la paix qui accompagnait les civils et avec qui j'avais pu échanger quelques mots, m'avait déclaré à l'époque qu'il s'agissait d'arrestations d’israélites.
Par la suite, j'ai appris que cette femme avait été internée au camp de Drancy. Depuis je n'ai plus entendu parler d'elle. »
Le témoignage est purement factuel, aucune empathie ne s’en dégage. Maria qui était sa voisine, une française, née à Paris est considérée comme étrangère vivant avec un de ses compatriotes. L’arrestation d’israélites ne semble pas provoquer de réaction mais un rapport administratif n’est pas fait pour exprimer ses sentiments !
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