Les photos de la mémoire et Marcel Podchlebnik
J’avais évoqué une visite au cimetière de Bagneux dans un précédent article (celui daté du 10 avril).
En me rendant sur la tombe du demi-frère de mon père, Marcel mort à l’âge de 7 ans dans des circonstances imprécises, j’avais fait le triste constat de l’état d’abandon de sa sépulture et de l’effacement de son nom sur la dalle.
Grâce à la précieuse intervention du gestionnaire de la concession, l’Association des amis israélites de France, le nettoyage de la dalle et le rechampissage du nom ont été réalisés.
Le passage de Marcel sur terre laissera encore une trace pour les rares visiteurs, mais pour combien de temps encore?
Outre un nom laissé sur une sépulture, quelques rares photos témoignent des existences passées.
C’est dans cette perspective que je m’occupe en ce moment de l’annotation et du tri de photos familiales laissées en dépôt au Mémorial de la Shoah en 2012.
J’apporte des corrections et annotations sur un fichier papier et je dois avouer que ce travail est assez fastidieux et chronophage car il doit reprendre toutes les informations acquises au cours de mes recherches depuis ce dépôt et, en plus de dix ans, elles ont été nombreuses. De plus, prendre une gomme et un crayon papier sont autant de gestes qui nécessitent du temps et de la patience auxquels nous ne sommes plus habitués.
Noter la réalité historique au plus juste avec des dates et des lieux mieux identifiés me parait une transmission d’autant plus nécessaire que les derniers témoins de cette époque disparaissent et qu'une période noire se profile actuellement en France et d’une façon plus générale dans le monde..
Si des visages resteront toujours inconnus sur de nombreuses photos, j’ai regardé attentivement celles, deux seulement, sur lesquelles Marcel était présent. L’une d’elles est en dépôt au Mémorial, elle a été prise en studio à Paris : Jacqueline la plus jeune sœur de mon père, pose debout souriante portant dans les bras et regardant son demi-frère Jean qui semble au bord des larmes tandis que Marcel sérieux installé debout sur une table basse esquisse en timide sourire face à l’objectif... la photo a du être prise juste après la guerre puisque début 1946 Marcel perdait la vie.
J'ai pu identifier une autre photo cette semaine, que j’avais négligée jusque-là, en faisant des recoupements avec d’autres et grâce à la loupe dont j’ai du mal à me passer! Une photo source de nouvelles et précieuses recherches...
Bien qu’usée, pâle et difficilement lisible, les personnages sont identifiables.
Une jeune fille entoure de ses bras un petit garçon tandis qu’un autre, plus jeune, assis dans un lit les regarde ou regarde peut-être le photographe comme les deux autres le font, la scène se situe dans un dortoir. Le contexte de l'histoire familiale et les documents d’archives recueillis me permettent de déduire la date et le lieu de la réalisation du cliché. Cette jeune fille est ma tante Anne libérée du camp de Drancy en 1943 en tant que mineure isolée, elle est âgée de 16 ans, et sera placée un temps dans un centre d’accueil pour enfants juifs situé à Paris, le centre Guy Patin avant d'être évacuée au centre Montévidéo Elle retrouve ses deux-demi frères Marcel, 5 ans et Jean 3 ans, qui ont du être cachés après l’arrestation de leur grande sœur rue Basfroi en mars 1943.
Figés tous trois sur cette photo, ils témoignent d’un passé que l'on espèrerait être révolu pour toujours....
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